Le Commerce du Bois

Retour sur le webinaire organisé par la fédération européenne des panneaux sur les importations illégales de contreplaqué en Europe

Actualité 11.09.2024

Le 10 septembre, la Fédération Européenne des Panneaux (EPF) et l'Association Polonaise du Contreplaqué (SPPDwP) ont organisé un webinaire sur « Les risques et conséquences de l'achat de contreplaqué en provenance de Russie et de Biélorussie ». Cet événement a réuni des experts pour analyser les impacts des importations illégales de contreplaqué, les risques juridiques liés à la non-conformité aux sanctions européennes, et des solutions innovantes pour vérifier l'origine du bois importé grâce à des technologies avancées de traçabilité.

Contexte des sanctions sur les bois russes

Mārtiņš Lācis a présenté un aperçu des événements récents qui ont marqué le marché du contreplaqué en Europe et au Royaume-Uni. Depuis 2017, le marché européen du contreplaqué a connu des perturbations majeures en raison de pratiques de dumping par la Russie. Le dumping fait référence à la vente de produits à l'exportation à un prix inférieur à leur valeur normale, souvent en dessous des coûts de production. Ces pratiques peuvent nuire aux producteurs locaux dans les marchés d'importation. En réponse à ces pratiques, la Commission Européenne (CE) a mené des enquêtes et, en conséquence, a imposé des droits antidumping pour protéger l'industrie européenne. Ces droits sont des mesures tarifaires visant à équilibrer le jeu concurrentiel et à protéger les producteurs locaux contre les importations vendues à des prix injustement bas. En 2022, en réaction à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, un embargo a été mis en place sur les importations de produits en bois provenant de Russie et de Biélorussie. Cet embargo visait à réduire les revenus pouvant soutenir les efforts de guerre de la Russie. Cependant, malgré ces mesures, le marché a vu une augmentation des importations de contreplaqué illicite, entraînant des répercussions négatives pour l'industrie européenne, comme la fermeture d'usines et le gel des investissements. Pour combattre ces pratiques, la CE a également introduit de nouveaux codes douaniers spécifiques pour le contreplaqué de bouleau (44123310), tentant ainsi de tracer plus efficacement l'origine des produits et de lutter contre les contournements de sanctions. Malgré ces efforts, les sanctions ont indirectement encouragé l'émergence de nouveaux flux commerciaux, posant des défis supplémentaires en matière de traçabilité et de conformité réglementaire.

Les conséquences du contournement des sanctions

Les sanctions ont créé de nouveaux flux d'importations en provenance de pays comme le Kazakhstan, la Turquie, la Moldavie, la Chine et le Vietnam, dont certains n'ont pas de ressources locales en bouleau. En parallèle, la Russie a exporté de grandes quantités de contreplaqué de bouleau vers ces pays, avec des chiffres en forte hausse, notamment vers l'Égypte (337 000 m³), la Chine (244 000 m³), et la Turquie (196 000 m³). Ces réexportations compliquent la traçabilité et facilitent les pratiques de contournement des sanctions. En effet une enquête de la Commission européenne a révélé que le contreplaqué russe, bien qu’interdit, est souvent réexporté via d'autres pays où il est partiellement transformé avant d'entrer dans l’UE sous une nouvelle origine déclarée. Ces pratiques de contournement non seulement faussent la concurrence en offrant des produits moins chers mais affectent aussi la durabilité des pratiques commerciales.

Développement du marché du contreplaqué de bouleau dans l'UE et le Royaume-Uni, en millions de mètres cubes

 

       

 

 

Les défis actuels

En 2024, le marché du contreplaqué doit relever plusieurs défis. Bien que les importations du Kazakhstan et de la Turquie aient diminué, celles provenant de pays comme la Chine, la Géorgie, l'Égypte et l'Ouzbékistan continuent d'augmenter. La Chine enregistre une densité moyenne de contreplaqué plus élevée, tandis que la Géorgie annonce une production accrue. Cependant, il n'y a pas de justifications claires pour la hausse des importations depuis l'Égypte et l'Ouzbékistan, où la provenance des matériaux reste incertaine. Malgré une légère baisse, le marché est encore marqué par un taux de 16 % d'importations de contreplaqué d'origine douteuse, contre 19 % en 2023.

Certains pays affirment que leurs matières premières de bouleau proviennent de l'Union européenne, notamment des pays baltes et de la Lettonie, mais sans preuves solides pour étayer ces déclarations. Pour renforcer la conformité, de nouvelles technologies de traçabilité permettent de vérifier plus précisément l'origine des matériaux. Les producteurs de contreplaqué collaborent également pour garantir la transparence de la chaîne d'approvisionnement, et une enquête a été ouverte en Lettonie pour clarifier la situation. Par ailleurs, des stocks de contreplaqué de bouleau provenant du Kazakhstan et de la Turquie, jugés « invendables », sont parfois écoulés sous les marques des producteurs européens, ce qui complique encore le marché.

Impacts sur l'Industrie Européenne

Le dumping pratiqué par la Russie a eu un impact négatif sur l'industrie européenne du contreplaqué, entraînant une réduction de la capacité de production d'environ 150 000 m3 et un gel des investissements pour le développement pendant trois ans. En 2023, les importations de contreplaqué illicite représentaient 19 % du marché, soit un chiffre d'affaires de 175 millions d'euros, dont la majorité des bénéfices a été dirigée vers la Russie, soutenant ainsi indirectement la guerre et non les producteurs respectant les règles du commerce équitable. Les consommateurs sont souvent induits en erreur quant à l'origine réelle des produits, et les prix plus bas des contreplaqués illicites offrent à certains consommateurs des avantages injustes par rapport à leurs concurrents. Au premier trimestre de 2024, une baisse supplémentaire de 5 % de la production de contreplaqué de bouleau en Europe a été enregistrée, ce qui a réduit l'utilisation des capacités à environ 80 %, augmentant ainsi le risque de pertes d'emplois. Les producteurs européens de bouleau sont contraints de consacrer leurs ressources à la défense du commerce équitable plutôt qu'à investir dans l'avenir.

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