L’année 2018 se clôture sur un bon niveau d’activité, malgré de fortes contraintes. Un bon niveau d’activité, puisqu’elle progresse encore de 2,3 % en volume, après 4,9 % en 2017 et 2,0 % en 2016. De plus, les carnets de commandes s’affichent à haut niveau en fin d’année, aux environs de 6 mois de production, tous métiers et toutes tailles d’entreprises confondus. L’emploi suit, avec une hausse de 2,6 % en 2018, soit 30 000 postes créés, dont 24 000 salariés, très majoritairement recrutés en CDI. Le score eut pu s’avérer bien meilleur, si les entreprises n’avaient pas buté sur la contrainte de fortes difficultés de recrutement, quasiment aussi prégnantes qu’en 2006-2007. Ces dernières expliquent d’ailleurs un déport d’une partie de l’activité sur le début 2019.
2018 a été aussi marquée par l’amorce d’un retournement sur le marché du logement. Comme nous l’avions craint et annoncé, la pénalisation tous azimuts de la pierre, faussement assimilée à une « rente », a cassé l’élan. Baisse des APL locatives, mise en place de la Réduction de loyer de solidarité (RLS) et hausse à 10 % de la TVA applicable dans le locatif social ; suppression de l’APL accession ; suppression de l’éligibilité au « Pinel » en zones B2 et C, mise en place de l’IFI et non éligibilité des revenus fonciers au Prélèvement forfaitaire unique (PFU) ; sortie progressive des fenêtres et chaudières performantes au fioul du champ du CITE, ces attaques concertées sur tous les segments du marché ont fini par déstabiliser les acteurs. Et encore, le PTZ a été sauvé, bien que raboté, en zones B2 et C !
Les mises en chantier de logements reculent donc de près de 6 % en 2018, passant de 428 000 à 404 000 unités. Les permis et les ventes de logements ressortant en net retrait sur l’année, la baisse des mises en chantier s’accélèrera en 2019, pour atteindre -7 %. Le décompte des logements commencés s’établira alors un peu en deçà de 380 000 unités. Compte tenu des délais de production, l’activité des entreprises de bâtiment en logement neuf s’est logiquement maintenue en hausse de 2,8 % en 2018, mais connaitra un repli progressif en 2019 pour ressortir à -4,5 % sur l’ensemble de l’année. Comme en 2012-2013, la reprise fléchira donc sous les coups de boutoir des économies budgétaires de court terme.
Malgré un environnement économique tout aussi chahuté que pour le logement, la tendance reste plus favorable dans le non résidentiel neuf, non soumis aux aléas des dispositifs publics de soutien de la demande. Hors locaux agricoles, les surfaces commencées progressent encore de 1,3 % en 2018 et connaîtront une quasi-stabilisation en 2019, à -0,4 %. Ce tassement de tendance ressort principalement de l’évolution sur le segment des locaux commerciaux qui, après une bonne résistance pendant la crise 2007-2015, souffre de l’explosion d’une bulle immobilière et de la concurrence de l’e-commerce. Quant aux bâtiments industriels et assimilés, ils ont connu un passage à vide au deuxième semestre 2018. Mais les dernières enquêtes de l’Insee auprès des industriels laissent espérer un simple report des investissements prévus sur 2019. Enfin, le marché des bureaux reste très bien orienté et celui des bâtiments administratifs bénéficie de l’aspiration créée par les municipales de 2020. Au global, compte tenu là encore des délais de production, l’activité en non résidentiel neuf des entreprises s’affiche en vive progression de 7,4 % en 2018 et devrait ressortir à +3,0 % en 2019.
Quant au segment de l’amélioration-entretien, il a souffert des hésitations du marché de la rénovation énergétique. Sur 2018, l’activité a connu une petite hausse de 0,8 %. La réintégration du remplacement des fenêtres à simple vitrage dans le champ du CITE devrait permettre de conserver un peu d’allant au marché, qui progressera de 0,5 % en 2019.
Au global, il semble que le secteur s’approche progressivement d’un haut de cycle. La première moitié de 2019 bénéficiera encore de l’élan engrangé en 2018, mais la seconde moitié de l’année souffrira de la chute du logement neuf, seulement partiellement compensée par la dynamique du non résidentiel neuf et par la résistance de l’amélioration-entretien. Au total, l’année 2019 s’affichera en léger retrait de 0,5 %. Toutefois, ce mouvement en deux temps se traduira par un bilan encore légèrement positif de l’emploi, avec de l’ordre de 5 000 postes créés en moyenne annuelle.
Au-delà, une période de stabilisation pourrait se dessiner. Trois facteurs positifs, venant en complément de ceux déjà mentionnés, devraient permettre de mettre un frein à la baisse du logement.
Il s’agit d’abord de l’annonce de la réouverture du dossier PTZ en zones B2 et C. Nous souhaitons que l’on débouche rapidement, avant la fin juin 2019, sur la pérennisation du dispositif, à l’horizon du quinquennat, avec une quotité de 40 %, soit un alignement sur ce qui existe déjà pour les zones A et B1. Sous cette condition, la casse sur le logement neuf se trouverait limitée en fin 2019 et au-delà.
Il s’agit ensuite de la relance effective de l’Anru et de la mise en place du programme « Action Cœur de ville », accompagné depuis du « Denormandie ancien ». Ces grands « plans logement » s’attaqueront à la situation de territoires en difficulté, notamment du fait de la morphologie urbaine et de bâtiments inadaptés aux usages d’aujourd’hui et seront sources d’activité pour les entreprises sur ces zones. Plus précisément, sur le « Denormandie ancien », même à supposer que seuls 10 % du parc vacant éligible en bénéficient, c’est un total d’environ 40 000 logements locatifs privés qui pourraient revenir sur le marché locatif privé.
Il s’agit enfin des lois Elan et Essoc votées en 2018. Les mesures structurelles qu’elles contiennent, notamment en matière de simplification et d’amélioration des règles d’urbanisme, devraient permettre de progressivement faciliter l’acte de construire, tout en limitant les hausses de coût.