Actualité 22.04.2021
L'Union Européenne envisage d'introduire de nouvelles mesures de politique forestière et climatique qui remodèleraient les relations commerciales avec les pays tropicaux. A certains égards, les mesures proposées s'appuient sur le cadre politique existant du plan d'action FLEGT (Forest Law Enforcement, Governance and Trade). Toutefois, ces nouvelles mesures remettraient en question l'avenir des instruments existants, tels que le règlement sur le bois de l’Union Européenne (RBUE) et le régime d'autorisation FLEGT.
Lors du webinaire "“Enforcing Due Diligence regulation for forest risk commodities" organisé par le FERN le 17 mars 2021, Hugo Schally, directeur de la direction de l’environnement de la Commission Européenne, a présenté les dernières réflexions de la Commission Européenne sur les questions internationales liées à la foresterie et a présenté les contours d’une proposition législative visant à éviter ou à réduire au minimum la mise sur le marché de l’UE de produits associés à la déforestation ou à la dégradation des forêts.
M. Schally a mentionné certaines des conclusions préliminaires de la Comission Européenne dans le cadre du contrôle continu du RBUE, notant à la fois des résultats positifs et des défis persistants. Sur la réglementation FLEGT,M. Schally s'est interrogé sur la valeur de l'approche basée sur les autorisations FLEGT, élément central du processus APV (Accords de Partenariat Volontaires) jusqu'à présent."En ce qui concerne la réglementation FLEGT, je pense que nous devons faire la distinction entre ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné ".
Depuis 2005, seul un pays sur les 15 avec lesquels la Commission Européenne s’est engagée, a mis en place un système de délivrance d'autorisations FLEGT. M. Schally a également souligné que l’intention de l’UE sera de modifier la portée et l’objectif de ces accords, afin d’inclure un éventail plus large de produits de base présentant un risque forestier, en mentionnant le bœuf, l’huile de palme, le soja, le caoutchouc, les céréales, le cacao et le café aux côtés du bois.
Suite aux observations relatives au manque d'efficacité perçu du RBUE et du FLEGT, la Commission Européenne envisagerait un changement significatif d'orientation politique. À ce stade, il est impossible de prévoir les impacts d'un tel changement. Cependant, il est possible que le RBUE soit intégré dans une réglementation plus large couvrant tous les produits "présentant un risque forestier" et incluant des exigences contre la déforestation.
Quant aux APV, après une période de 15 ans pendant laquelle l’UE a activement encouragé les pays tropicaux à adopter des systèmes d’autorisation FLEGT pour les produits bois par le biais de ces accords commerciaux, l’objectif des futures négociations pourrait changer de manière significative. L’objectif pourrait être de finaliser des accords couvrant tous les produits de base présentant un "risque forestier", tels que définis dans le nouveau règlement de l’UE, et de développer des procédures "d’évaluations comparatives par pays" et de "certification publique" afin de démontrer que leur commerce ne contribue pas à la déforestation ou à la dégradation des forêts.
Les accords pourraient également mettre davantage l'accent sur le suivi des impacts du commerce des produits agricoles sur les stocks de carbone forestiers. Cela s'alignerait sur une autre mesure politique prévue par la Commission Européenne, à savoir l'introduction d'une taxe sur le carbone aux frontières, pour laquelle une proposition détaillée est attendue en juin. Cette taxe devrait contribuer au financement de NextGenerationEU, l'instrument de relance économique de 750 milliards d'euros (888 milliards de dollars) actuellement déployé dans toute l'UE, contribuant à l'objectif européen de réduction des émissions de 55 % par rapport aux niveaux de 1990 d'ici à 2030, en vue de rendre l'UE climatiquement neutre d'ici à 2050.
Les commentaires de M. Schally sur les limites de l'EUTR et de l'autorisation FLEGT soulèvent des questions immédiates sur l'avenir des APV ratifiés avec sept autres pays producteurs de bois tropicaux - Cameroun, République centrafricaine, République du Congo, Ghana, Indonésie, Liberia et Viet Nam - plus les deux accords encore en attente de ratification avec la Guyane et le Honduras.
Les enjeux sont particulièrement élevés pour l'Indonésie, qui délivre des autorisations FLEGT depuis près de cinq ans et qui a réussi à appliquer son système d'assurance de la légalité du bois (TLAS) et la certification SVLK à toutes les exportations de produits du bois. Elle attend de l'UE qu'elle donne suite aux engagements pris dans l'APV "pour promouvoir une position favorable sur le marché de l'Union". Cela implique également des efforts supplémentaires pour communiquer sur les avantages de l'autorisation FLEGT, comme le rapport publié en 2020 par le Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR).
Le rapport du CIFOR qui s'intitule "Collecting Evidence of FLEGT-VPA Impacts for Improved FLEGT Communication", et qui s'appuie sur des recherches menées au Cameroun, au Ghana et en Indonésie, conclut que "globalement, le processus APV a contribué de manière positive à la diminution des taux d'exploitation illégale des forêts, en particulier du bois industriel illégal sur les marchés d'exportation, notamment grâce à l'obligation pour les forêts de production de disposer de plans de gestion".
Source : Lettre d'information ITTO