Le Commerce du Bois

Trump durcit les droits de douane sur le bois : quelles conséquences pour l’industrie forestière ?

Actualité 07.03.2025

Le département du Commerce des États-Unis a récemment annoncé une augmentation significative des droits antidumping sur le bois résineux canadien, les faisant passer de 7,66 % à 20,07 %, auxquels s’ajoutent des droits compensateurs de 6,74 %, portant le total des droits à près de 27 %. Contrairement aux tarifs généraux de 25 % sur les importations canadiennes, qui servent principalement de levier de négociation, ces nouveaux droits sont conçus pour rester en place sur le long terme.

Une stratégie protectionniste assumée

L’objectif de l’administration Trump est clair : stimuler la production nationale de bois afin de répondre à la demande intérieure et de réduire la dépendance aux importations canadiennes. À cette fin, deux décrets présidentiels ont été publiés le 1er mars 2025 :

  1. Faciliter l’exploitation forestière aux États-Unis en assouplissant les réglementations qui limitent la récolte de bois et en augmentant les volumes prélevés dans les forêts publiques.
  2. Lancer une enquête sur l’impact des importations de bois sur la sécurité nationale, couvrant non seulement les sciages résineux, mais aussi le papier, les meubles et d’autres produits transformés.

Ces décisions sont fortement soutenues par la US Lumber Coalition, un puissant lobby industriel qui milite pour la réduction des importations canadiennes. Mais l’administration semble aller plus loin en envisageant d’étendre ces mesures aux meubles en bois et au papier importés.

 

Un marché sous tension

À court terme, l’annonce de ces mesures a fait grimper le prix des sciages résineux aux États-Unis, atteignant un record historique de 650 USD par millier de pieds-planche (MBF) – un niveau observé uniquement pendant la période COVID. Cependant, cette hausse reste insuffisante pour absorber l’impact des droits de douane, ce qui signifie que le marché doit choisir entre :

  • Une augmentation supplémentaire des prix pour compenser ces taxes, ce qui pourrait freiner la demande.
  • La recherche d’alternatives aux sciages canadiens s’annonce complexe à court terme.

Les importations européennes (environ 15 % des volumes totaux importés) pourraient augmenter, mais l’administration américaine envisage d’y appliquer des droits spécifiques. Quant aux sciages russes, soumis à des droits prohibitifs de 40 à 50 %, leur situation pourrait évoluer dans les mois à venir. En revanche, le Brésil, le Chili et la Nouvelle-Zélande ne sont pas encore ciblés par de nouvelles taxes, ce qui leur offre une opportunité sur le marché américain.

 

Une guerre commerciale en préparation

Le 2 avril 2025, l’administration Trump détaillera ses nouvelles mesures tarifaires réciproques, qui ne concerneront pas uniquement le sciage, mais aussi les produits en bois transformé. Ces nouvelles mesures tarifaires pousseront les exportateurs canadiens à réorienter leurs ventes :

  • La côte ouest du Canada cherche à renforcer ses exportations vers le Japon et la Chine, en tentant de capter des parts de marché perdues par la Russie.
  • La côte est explore de nouveaux débouchés en Europe et au Moyen-Orient.

 

Qui sont les gagnants et les perdants ?

Les gagnants :

  • Les scieries américaines de résineux, qui bénéficieront d’une demande intérieure accrue.
  • Les fabricants d’équipements pour scieries aux États-Unis, qui verront une hausse des investissements dans les infrastructures de production.
  • L’industrie américaine du bois feuillu et de la transformation, qui pourrait profiter des nouvelles taxes sur les importations de meubles et de papier.

Les perdants :

  • Les exportateurs canadiens de sciages résineux, dont le marché américain représente une part essentielle de leurs revenus.
  • Les constructeurs et consommateurs américains, qui devront faire face à une hausse des prix du bois, impactant directement le secteur du bâtiment et le coût des logements.
  • Les importateurs de meubles et de papier, qui risquent d’être les prochaines cibles des nouveaux tarifs douaniers.

Avec ces nouvelles taxes, l’administration Trump accentue sa politique protectionniste, mais au prix d’une instabilité accrue sur le marché du bois. Reste à voir si cette stratégie portera ses fruits ou si elle entraînera des conséquences économiques imprévues, notamment une flambée des prix du logement aux États-Unis. Les prochains mois seront déterminants pour l’industrie du bois et de la construction.

Thématiques associées